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Cécile Oumhani pour Terre de femmes

 

Qui est l’Indien au-delà des miroirs ? Et où finira-t-il par rencontrer son double ? Par quels dédales de routes, de chemins et de montagnes faut-il se frayer pour arriver jusqu’à lui, et l’entrapercevoir, lui l’ange halluciné ? Que ses traits soient graves, meurtris ou encore inquiets, jamais ne s’éteint le feu de son regard, pas plus que son ardente humanité ne s’absente. Et c’est dans la braise de ces yeux devenus miroirs que s’entrouvre une quête qui peut être la nôtre, nous humains égarés sur la terre.

« dans la césure l’œuvre s’écrit
vaste fresque incendiée
paysage de sang. »

Les mots se logent et se délogent sous notre langue, à l’intérieur de ces failles sombres où il faut garder la braise vive et continuer quand même, malgré ce qui s’abîme, malgré ces « ocres qui pleurent sous l’averse ».

Car l’œil ne renonce pas, il contemple, même s’il est triste. Il sait que « [l]e mystère est plus vaste que l’effroi ». Et donc, il va toujours plus loin, porté par sa lueur à la recherche de ce qu’il lui faut déchiffrer.

« dans les plis de la terre
l’incandescence ouvre
un passage
entre deux mondes. »

Et c’est dans cet isthme que Simone Molina vient forger la langue du poème. Elle explore ces fonds secrets en nous, où ne cesse de résonner ce qui nous a assourdis, fracassés au-delà du temps. Oui, elle va au-delà des miroirs et, en le faisant, elle rejoint ce qui fait notre humanité souffrante mais toujours assoiffée d’un autre jour et d’une autre lumière.

Les peintures de Marcel Chetrit saisissent avec subtilité la mouvance des reflets, incarnant figures et silhouettes, comme en creux aux lisières du poème.

Un beau livre, fort et singulier.

D.R. Cecile Oumhani